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ACTION OU CONTEMPLATION?

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Lc 10, 38-42

Tout texte «inspiré» est susceptible de différents niveaux de lecture, de conformité aussi avec l' "inspiration" de ceux qui l'approchent. En fait, pour que l'étincelle de la sagesse s'allume, il en faut deux personnes "inspirées": l'écrivain et le lecteur.

Qu'est-ce que c'est l'inspiration? À un niveau de conscience mythique , elle était comprise comme l'acte par lequel Dieu parlait à la personne en son intérieur, qu'elle était conduite, dans son travail, par cette lumière de l'Esprit.

A partir du niveau transpersonnel (non-dualité), l'inspiration est perçue comme le processus par lequel la Conscience ou la Sagesse s'exprime à travers les personnes qui se vivent comme chemin ou canal, sans appropriation et, par conséquent, sans que l'ego puisse bloquer ce qui doit circuler.

En ce sens, il est beau de constater que, quand on se vit de cette manière, celui qui lit n'est pas différent de celui qui écrit: la Conscience qui écrit – par l'auteur- est aussi celle du lecteur. C'est ce qui explique l'admirable "harmonie" qui se produit à certaines occasions- celui qui lit ou écoute sent qu'on est en train de mettre des mots à sa propre expérience-, ainsi que la puissante force transformatrice que contient l'"inspiration".

Cette introduction m'est venue en m'approchant du texte de Luc et vérifiant, encore une fois et contre ce que les lectures réductionnistes suggèrent, que c'est notre propre vie qui est en train de lire.

À un premier niveau, il semble que le texte est né d'un intérêt concret de la première communauté chrétienne: montrer que le vrai disciple est celui qui écoute la parole de Jésus. C'est, semblent-ils argumenter, la «seule chose nécessaire».

Par la suite le dualisme s'est accentué, au point d'opposer deux attitudes tout aussi précieuses, dans la discussion classique sur l'action et la contemplation: qu'est-ce qui est plus précieux?

Le dualisme ne peut que conduire à l'erreur, car il oppose des chose qui, en réalité, sont complémentaires. Dans cette discussion de «spiritualité» (mystique, contemplation) et «engagement» (prophétie, action sociale), il suffit de nommer un de ces éléments pout que l'autre reste relégué.

Alors que, si nous nous approchons du texte d'une autre perspective plus profonde, il ne nous faut pas longtemps pour découvrir que "Marthe" et "Marie" sont deux attitudes qui nous habitent chacun de nous. Et toutes les deux, loin de s'exclure, se réclament l'une l'autre: la contemplation est synonyme d'engagement.

Ce qu'on réproche à Marthe, dans le récit, n'est pas son action, mais son inquiétude ou agitation. L'inquiétude est un symptôme de l'ego, parce que l'ego lui-même est inquiétude et hâte (pour être insatisfaction); le Témoin, par contre, est impartiel parce qu'il sait que notre véritable identité ne peut pas être affectée négativement.

L'agitation déforme tout – aussi bien l'action que la contemplation-, car en tout il y a une recherche de l'ego.

L'engagement sans la contemplation devient activisme, guidé par les attentes de l'ego, ce qui n'augure rien de bon. Parce que, comme John R. Price disait, "tant qui tu ne transcendes l'ego, tu ne pourras que contribuer à la folie du monde."

Pour sa part, la contemplation sans engagement n'est qu'absorption narcissiste . Dans ce cas aussi, le sujet est l'ego et ses besoins.

Face à quelque lecture réductionniste qui scinde la réalité, il me semble important de souligner que la contemplation authentique est non-duelle. Ce qui signifie affirmer que la contemplation est le coeur de l'engagement. Et l'engagement est l'expression de la contemplation.

Ce n'est que dans ce cas, que la Vie peut passer. Parce qu'alors, le sujet n'est plus le je(moi) – qui agit ou contemple -, mais la Conscience que nous sommes et qui s' exprime toujours comme Sagesse (Compréhension) et Compassion (Bonté).

Or, l'ego ne peut voir ni vivre cette complémentarité. Parce que sa nature même lui en empêche. Son propre caractère d'appropriation ne permet pas, en fait, que les deux dimensions surgissent simultanées. Malgré ses intentions volontaristes pour vivre harmonieusement cette double dimension, il finira par constater leur inutilité.

Le chemin passe, donc, comme pour beaucoup d'autres choses, par transcender l'ego ..., jusqu'à reconnaître que tu n'es pas lui. Et, dès que tu te découvres dans ta véritable identité, tout surgit sans séparations ni appropriations, sans comparaisons ni disqualifications ..., car le supposé «sujet» qui le faisait a disparu, et, avec lui, l'agitation dont parle le texte.


Enrique Martínez Lozano

www.enriquemartinezlozano.com

Traducteur: María Ortega

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