MARIE ET LE FILS, MÉTAPHORES DU RÉEL
Enrique Martínez LozanoLc 1, 26-38
Si nous approchons d'un point de vue non-duel le récit bien connu de l'"Annonciation" nous pouvons le lire comme une métaphore de l'ensemble de toute notre réalité.
C'est clair que, à son origine, il s'agissait d'un récit mythique. Dans ce "langage", les êtres célestes habitaient un niveau supérieur et intervenaient miraculeusement dans la vie des êtres humains.
Avec ce langage, Luc présente Marie comme la femme choisie pour être la mère-vierge du Fils de Dieu. Toujours dans cette "langage", l'auteur de l'évangile souligne ces aspects-là qui semblent les plus pertinents:
• le salut de la part de Dieu, salutation de joie et de bénédiction;
• le message de confiance, caractéristique des théophanies: "ne crains pas";
• la présentation de la personne de Jésus comme Messie et Fils de Dieu, ce qui "exigerait" qu'il soit né sans concurrence masculine, comme une manière d'indiquer qu'il est "tout" de Dieu;
• la puissance de Dieu pour qui "rien n'est impossible;
• la docilité de Marie, qui s'abandonne à Dieu dans l'acceptation sans réserve.
Tout ce contenu peut également âtre assumé dès une position religieuse théiste. Ce qu'on a fait là c'est "traduire" le "langage mythique" à un autre "rationnel".
Mais il y a lieu pour une autre traduction pour qui se trouve à un autre niveau de conscience et approche la réalité dès une perspective non-duelle.
Dans ce cas, où tout est perçu comme "reflet" de tout, dans une unité sans coutures, Marie est une métaphore de toute l'humanité: la part "visible" où s'exprime et se manifeste le Mystère invisible ("Dieu"), destinée à donner naissance au Fils, métaphore à son tour de l'unité humaine-divine que nous sommes tous.
De ce point de vue, nous tous nous sommes, en même temps, Marie et le Fils. "Marie" représente le "processus" d'être enceinte qui met au monde la plénitude. Le "Fils" est cette même plénitude qui embrasse tout .
En nous reconnaissant comme "Fils", nous devenons conscients de la Plénitude que déjà nous sommes: l'étreinte étérnelle entre le Vide et les Formes, le Non-Manifesté et le Manifesté. En nous reconnaissant comme "Marie", nous devenons conscients du profond Désir qui surgit à travers nous pour être des canaux qui se laissent vivre Dieu en sa forme quotidienne.
Nous sommes, donc, plénitude, qui, au niveau relatif, perçoit sa vie comme "processus".
Quant à plénitude, notre nom le plus profond est Joie, Grâce, Bénédiction, Confiance, Force... Quant à "processus", nous sommes appelés à vivre une attitude d'acceptation et d'abandon à Ce qui est. La prière théiste l'exprime avec cette expression: "Qu'il se fasse en moi selon ta parole", qui nous rappelle celles que Jésus lui-même dira plus tard: "non pas ce que je veux, mais ce que tu veux" (Marc 14:36).
Face à "Dieu", face au mystère de Ce qu'il est, il n'est une autre attitude que se rendre. L'ego se rébèle parce qu'il comprend cela comme conformisme, passivité ou indifférence. Mais, en vérité, l'égo se résiste à laisser de contrôler. Malgré qu'en fait, il ne contrôle rien, il maintien l'illusion de le faire. Et en dépit de ses interventions qui ne réussissent rien, si ce n'est qu'abîmer la réalité, il vit de l'illusion -contestée par des siècles d'expérience– qu'il va être capable de mettre fin à la souffrance humaine.
L'abandon, par contre, nous met sur la voie de la sagesse, nous réconcilie avec le Réel, nous aligne avec le moment présent... La résistance et l'appropriation finissent. Et c'est alors que nous permettons à la Sagesse, qui gouverne tout, qu'elle puisse agir à travers nous. C'est pourquoi, ce n'est que lorsque nous nous abandonnons au Réel, sans que l'ego s'approprie de l' action, que l'action adéquate surgira.
Enrique Martìnez Lozano
Traducteur: María Ortega