UN REGARD NOUVEAU
José Antonio PagolaL'histoire de l'aveugle de Siloé est structurée sur la base d'un fort contraste. Les Pharisiens croient tout savoir. Ils ne doutent de rien. Ils imposent leur vérité. Ils expulsent même le pauvre aveugle de la synagogue: «Nous savons que Dieu a parlé à Moïse». «Nous savons que l'homme qui t'a guéri n'observe pas le sabbat». «Nous savons que c'est un pécheur».
Au contraire, le mendiant guéri par Jésus ne sait rien. Il ne raconte que son expérience à ceux qui veulent l'écouter: «Je sais seulement que j'étais aveugle et maintenant je vois». «Cet homme a agi sur mes yeux et j'ai commencé à voir». L'histoire se termine par ce dernier avertissement de Jésus: «Je suis venu pour que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles».
Jésus a peur d'une religion préservée par des scribes sûrs d'eux-mêmes et arrogants, qui manipulent de façon autoritaire la Parole de Dieu pour l'imposer, pour l'utiliser comme une arme ou même pour excommunier ceux qui pensent autrement. Il craint les docteurs de la loi, plus soucieux de «d'observer le sabbat» que de «guérir» les mendiants malades. Une religion avec des «guides aveugles» lui semble une tragédie, et il le dit ouvertement: «Si un aveugle conduit un autre aveugle, tous les deux tomberont dans la fosse».
Théologiens, prédicateurs, catéchistes et éducateurs, nous qui prétendons «guider» les autres sans peut-être nous être laissés éclairer par Jésus, ne devrions-nous pas d'abord écouter son interpellation? Allons-nous continuer à répéter inlassablement nos doctrines sans vivre une expérience personnelle de rencontre avec Jésus qui puisse nous ouvrir les yeux et le coeur?
Notre Église aujourd'hui n'a pas besoin de prédicateurs qui remplissent les Églises de paroles, mais de témoins capables de communiquer, quoique humblement, leur petite expérience de l'Évangile. Nous n'avons pas besoin de fanatiques qui défendent les «vérités» de manière autoritaire et avec un langage vide, truffé des clichés et des phrases toutes faites.
Nous avons besoin de vrais croyants, attentifs à la vie et sensibles aux problèmes des gens, chercheurs de Dieu capables d'écouter et d'accompagner avec respect tant d'hommes et de femmes qui souffrent, qui cherchent et qui ne réussissent pas à vivre d'une manière plus humaine et plus croyante.
José Antonio Pagola
Traducteur: Carlos Orduna
Publicado en www.gruposdejesus.com