Lc 19, 1-10

Bien que «riche» -chef de collecteurs d'impôts, avec gloire, il semble bien méritée, de corrompus-, Zachée était socialement et religieusement marginalisé, au point d'être considéré un «pécheur public» que l'on devait éviter.

Encore une fois, Jésus brise les tabous et les étiquettes sur ce qui est «socialement correct». On aurait pu s'attendre à condamner quelqu'un qui, non pas seulement vivait au service de l'empire qui opprimait son peuple, mais qui volait à ce même peuple appauvri.

Néanmoins, derrière tout cela, Jésus continue à y voir un semblable («il est aussi fils d'Abraham»), et comme tel il le traite. Cela ne signifie pas qu'il justifie son comportement, cependant en fait cela n'était pas en jeu, mais la personne qui était derrière ce comportement et ce «rôle-là».

Là où le gens ne voyaient qu' un «personnage» (pécheur public), Jésus voit un être humain, en qui lui aussi se reconnaît: «ce que vous avez fait à l'un de ces petits, c'est à moi que vous l'avez fait» (Mt 25:40).

Il fait face aux critiques et aux murmurations, venant sans aucun doute des personnes le plus «religieuses» et «sérieuses», celles qui souvent ont bien catalogué tous les autres, dans le schéma typique de la personnalité fanatique: «les nôtres» et «tous les autres».

Voyant Jésus se mettant du côté de quelqu'un qui n'appartient pas aux «nôtres» - parce que c'est un «pécheur»-, les murmurations se déclenchent, pour une raison bien simple: il a remis en question le schéma qui, soi-disant, leur garantissait une supériorité moral et, avec cela, sécurité. Parce que – la religiosité fondée sur l'idée du mérite apparait à nouveau -, si tout le monde peut être traité de la même manière - comme «les ouvriers dans la vigne» - qu'importent tous nos efforts et nos mérites?

Cependant, il arrive quelque chose de remarquable: cet homme-là qui n'avait pas changé son comportement en dépit de toutes les critiques et le mépris qu'il avait reçus, commence à voir les choses différemment. Il commence à regarder comme lui-même s'est senti regardé par Jésus. Et cette manière de voir c'est ce qui fait place à une nouvelle manière de faire.

Le «salut» consiste en ce changement, c'est ce que Jésus vient à dire. Et il se présente d'une manière profondément humaine et compatissante, comme «celui qui veut chercher et sauver ce qui était perdu».

Dans ce qui semble un net contraste avec l'attitude de Jésus, l'Eglise est apparue (apparaît), souvent, chez les personnes d'autorité, avec des gestes de méfiance, jugement et disqualification. Il semblerait qu'elle se serait constituée la gardienne de cette manière-là de voir qui aurait très clair par où passe la ligne de démarcation entre «les nôtres» et «ceux qui ne le sont pas", les «bons» et «ceux qui doivent se convertir» à ce que nous disons.

Ainsi, la Bonne Nouvelle a été remplacée par le moralisme de ceux qui se croient en possession de la vérité absolue.

Le chemin proposé par Jésus est diamétralement opposé: il part d'un regard profondément humain, qui sait voir le cœur limpide de la personne -au-delà de ce qu'elle fait ou ne fait pas-, et même au risque de se faire des ennemis, il se solidarise avec elle, en se faisant inviter chez elle.

À l'encontre de l'attitude moralisatrice de qui, à partir d'une prétendue supériorité, exige des changements ou émet des condamnations, Jésus «s'identifie» avec le chef des publicains, se mettant de sa part.

En fait, celui qui condamne ne sait pas qu'il est en train de se condamner lui-même, - quelque part de soi-même, cachée dans son ombre -; celui qui s'identifie avec l'autre, au-delà de ce que cet autre fait ou ne fait pas, vit dans la conscience que nous tous nous sommes un, dans l'identité plus grande qui nous constitue. Ce niveau de conscience est celui qui permet transformer la condamnation en compassion et, en dernier terme, en humanité.

Enrique Martìnez Lozano

Traducteur: María Ortega

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