Lc 1, 26-38

Ceux qu'on appelle "récits de l'enfance" n'apparaissent que dans les évangiles de Matthieu et Luc, mais pas dans deux de Marc et Jean. Ils semblent être des constructions plus tardives, faites après le reste de l'Evangile. Tout en reconnaissant le "poids" profond que ces récits ont eu dans la tradition chrétienne et la dévotion de tant de croyants, il s'agirait des récits légendaires – des "mythes", au sens originel du mot -, avec lesquels transmettre un message qu'ils considéraient fondamental.

En disant qu'ils appartiennent au genre mythique, on indique qu'ils revêtent un caractère spécial: à travers des images légendaires ils veulent transmettre un contenu précieux. Le mythe ne est pas quelque chose de faux, mais simplement raconté ou écrit dans un autre niveau de conscience, différent de celui strictement "rationnel".

Dans le cas des évangiles, ainsi que dans d'autres écrits sur des personnes célébres, l'objectif de ces "récits de l'enfance" n'en n'était qu'un: celui d'offrir au lecteur, dès le début de l'oeuvre, un "portrait" du personaje dont on faisait la biographie.

Les images utilisées par le mythe sont évidentes: ange - dialogue avec Marie - la vierge qui a conçu sans intervention de l'homme - l'idée d'un Dieu séparé et interventionniste pour qui "rien n'est impossible" ...

Le contenu visé par le récit que nous commentons est riche, surtout quand nous sommes capables de le lire à partir d'un point d'une perspective non-duelle. La figure de l'"ange" symbolise le lien entre le "divin" et l'"humain": tout est Un, bien que nous puissions distinguer  "deux niveaux" d'identité. Nous mêmes nous sommes, à la fois, "humains" (notre je individuel) et "divins" (l'Être unique et illimité).

Lorsque nous reconnaissons notre véritable identité, nous sommes un avec tous et avec tout: ce qui naît ensuite est le "Fils de Dieu", la nouvelle humanité. Mais cette naissance réquiert que notre ego ait présenté, au préalable, son certificat de décès. Et il fait cela quand nous nous alignons avec le présent et nous nous abandonnons pleinement à la Sagesse plus grande qui gouverne tout: "qu'il se fasse en moi selon ta parole".

La prière placé sur les lèvres de Marie apparaîtra plus tard dans la bouche de Jésus, au cours de l'angoisse avant sa passion: "Non pas ma volonté, mais la tienne" (Luc 22:42). Vraiment, il semble que c'est la seule "prière" bien choisie: qu'il soit ce qui doit être, j'aime ce qui est, je m'abandonne à la Sagesse plus grande qui guide le processus. Et alors, dans un paradoxe remarquable, en aimant ce qui est, nous ferons - comme Marie, comme Jésus – ce que nous aurons à faire.

Par ailleurs, il est indéniable que la naissance virginale est un mythe qui s'étendait dans l'antiquité depuis l'Egypte jusqu'à l'Inde. Horus, en Egypte, est né de la vierge Isis (après l'annonce que lui fait Thaw); Attis en Phrygie, de la vierge Nama; Krishna, en Inde, de la vierge Devaki; Dionysos, en Grèce, et Mitra, en Perse, de vierges sans nom ... Bien sûr, de la quasi-totalité d'entre eux on dit être né le 25 Décembre, au solstice d'hiver - dans l'hémisphère Nord, tout juste quand le soleil "naît" à nouveau, en battant la nuit.

Mais la profondeur du texte est extraordinaire. Marie est vierge parce qu'elle laisse l'Esprit agir en elle, vivant une disponibilité totale: "Qu'il se fasse en moi selon ta parole." La "virginité" est la désappropriation du je (moi), qui permet à Dieu (Vie, Mystère) de passer à travers nous, de notre  "forme" individuelle, qui est voie ou canal par lequel il s'exprime.

La virginité a peu à voir avec la question biologique; elle est, plutôt, synonyme de disponibilité. Son sens reste exprimé dans l'une des plus belles expressions que j'ai lues: "Jésus est ce qui arrive quand Dieu parle san obstacles dans un homme" (Jean Sulivan).

Enrique Martínez Lozano

www.enriquemartinezlozano.com

Traducción: María Ortega